ÉCHANGER SON BONHEUR
CONTRE LA SOUFFRANCE D’AUTRUI
Qui est-il ?
Matthieu Ricard est un moine bouddhiste, photographe et auteur.
Il est le fils du philosophe, essayiste et journaliste Jean-François Revel (né Jean-François Ricard) et de la peintre Yahne Le Toumelin.
Il voyage en Inde pour la première fois en 1967, où il rencontre des maîtres spirituels tibétains dont son maître Kangyour Rinpoché.
Après sa thèse en génétique cellulaire à l’Institut Pasteur, sous la direction du Pr. François Jacob (Prix Nobel de Médecine), il s’est consacré à l’étude et à la pratique du bouddhisme.
Depuis lors, il a vécu en Inde, au Bhoutan et au Népal ; il a étudié avec certains des plus grands maîtres de la tradition bouddhiste tibétaine, dont Kyapjé Kangyour Rinpotché (1897-1975) et Dilgo Khyentsé Rinpotché (1910-1991). Il devient moine en 1979.
Il est l’auteur de plusieurs livres qui incluent : Le moine et le philosophe, un dialogue avec son père ; L’infini dans la paume de la main, dialogue avec l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan ; Plaidoyer pour le bonheur, La citadelle des neiges et L’art de la méditation.
Une vie passée dans l’intimité des maîtres spirituels lui ont permis de saisir à travers son objectif les maîtres, les paysages et les peuples de l’Himalaya.
Il est l’auteur de :
*L’esprit du Tibet, Himalaya bouddhiste,
*Tibet : Regards de compassion,
*Un voyage immobile,
*Moines danseurs du Tibet et Bhoutan : Terre de sérénité. Ses photographies ont été exposées à New York (RMA Museum, Aperture Gallery), à Paris, Perpignan (Visa pour l’image), Winthertur, Stockholm et Hong-Kong.
En 1980, grâce à Dilgo Khyentsé Rinpoché, il rencontre pour la première fois le Dalaï-lama, dont il devient interprète français à partir de 1989. Il est également membre du comité de l’Institut Mind and Life, une organisation qui se consacre à la recherche menée en étroite collaboration entre des scientifiques, des érudits et des méditants bouddhistes.
Matthieu fait don de tous les revenus de ses livres à l’association humanitaire Karuna-Shechen (karuna-shechen.org) avec laquelle il a déjà mené plus de 130 projets humanitaires en Inde, au Népal et au Tibet (cliniques, écoles, orphelinats, maisons de retraite et de soins pour les personnes âgées).
Lorsqu’il ne voyage pas, Matthieu Ricard réside au monastère de Shechen, au Népal.
Je partage avec vous son analyse du lien entre souffrance et compassion ; ce que je pratique ..mais n’en connaissais pas la source Bouddhique.
« Pour développer la compassion, le bouddhisme a recours à une visualisation particulière qui consiste à échanger mentalement, par le biais de la respiration, la souffrance d’autrui contre notre bonheur, et à souhaiter que notre souffrance se substitue à celle des autres.
…
Nous penserons peut-être que nous avons déjà assez de problèmes, et que c’est trop demander que d’alourdir encore notre fardeau et de prendre sur nous la souffrance d’autrui.
C’est pourtant tout le contraire qui se produit. L’expérience montre que lorsque nous prenons mentalement la souffrance des autres par la compassion, non seulement cela n’augmente pas notre propre souffrance, mais au contraire, celle-ci diminue.
La raison en est que l’amour altruiste et la compassion sont les antidotes les plus puissants de nos propres tourments. C’est donc une situation dont tout le monde bénéficie ! À l’inverse, la contemplation de nos propres douleurs, renforcée par la constante rengaine du « moi, moi, moi » qui résonne spontanément en nous, sape notre courage et ne fait qu’accroître notre vulnérabilité.
Commençons par ressentir un amour profond à l’égard d’une personne qui a été d’une grande bienveillance à notre égard. Puis imaginez que cet être souffre énormément. Tandis que nous sommes ainsi envahis par un sentiment d’empathie douloureuse devant sa souffrance, laissons surgir en nous un puissant sentiment d’amour et de compassion, et commençons la pratique dite de l’échange.
Considérons qu’au moment ou nous expirons, en même temps que notre souffle, nous envoyons à cet être cher tout notre bonheur, notre vitalité, notre bonne fortune, notre santé, etc., sous la forme d’un nectar rafraîchissant, lumineux et apaisant. Souhaitons qu’il reçoive ces bienfaits sans aucune réserve, et considérons que ce nectar comble tous ses besoins. Si sa vie est en danger, imaginons qu’elle est prolongée ; s’il est malade, qu’il guérit ; et s’il est malheureux, qu’il trouve le bonheur.
En inspirant, considérons que nous prenons sur nous, sous la forme d’une masse noirâtre, toutes les souffrances physiques et mentales de cet être, et pensons que cet échange le soulage de ses tourments. imaginons que ses souffrances reviennent vers nous comme une brume portée par le vent. Lorsque nous avons absorbé, transformé et éliminé ses maux, nous éprouvons une grande joie, libre de toute forme d’attachement.
Réitérons maintes fois jusqu’à ce qu’elle devienne une seconde nature. Ensuite étendons graduellement cette pratique de l’échange à d’autres êtres connus, puis à l’ensemble des êtres. »
Matthieu Ricard